Carnet spirituel n° 28 : La Grâce (1ère partie)

Éditorial

La photographie qui illustre notre couverture a une histoire. Vous la lirez, racontée par le Père de Chivré lui-même. Certains n‘arrivent pas à discerner le visage qui apparaît en ombres et lumière. Mais ceux auxquels se révèle ce visage ne peuvent pas en être émus, comme l’était le Père qui distribuait volontiers des reproductions de cette photo. Aux dernières nouvelles, la jeune fille devenue carmélite qui a été actrice et témoin de la chose serait encore en vie.
Par ailleurs, notre association – qui ne connaît pas un développement fulgurant dans nos contrées – bénéficie aux États-Unis d’un appui sympathique. Suite à une idée remontant à janvier 2009, le directeur du séminaire et une amie de l’association ont pu mettre sur pied une maison d’éditions « Stas Editions » pour traduire et diffuser les textes du Père, qui suscitent là-bas un intérêt étonnant. Nos amis d ‘Amérique apprécient la spiritualité du Père, plus que ne le font les catholiques de France, sans doute blasés ou convaincus de n’avoir plus rien à apprendre ! Les vieux auteurs, les classiques suffisent à leur bonheur, et ils se méfient peut-être des formulations nouvelles, inédites, introuvables dans les livres bleus (ou d’autres couleurs) !
Rien de tel en Amérique, et cette maison d’édition vient de faire paraître son premier bijou : la traduction du livre sur la Messe « The Mass of Saint Pie V ». Un fort bel ouvrage, d’une présentation très soignée, auquel nous ne pouvons que souhaiter une bonne diffusion.
Dans notre vieille Europe et notre France blasée, la grâce est devenue la grande inconnue, la mal aimée. Depuis que l’homme est devenu le centre de l’univers, et que tout converge vers le culte de sa dignité et de ses droits, pourquoi et comment parler encore de la grâce ?

« The Mass of Saint Pius V »

Ernest Hello écrivait déjà il y a bien longtemps : «Depuis bien des années, le problème social est posé devant le monde. Les révolutionnaires essaient de le résoudre, au moyen de l’homme. Ils veulent sauver l’homme par l’homme !»
Et pourtant, si nous « nous souvenons que cette dignité dans laquelle l’homme avait été admirablement constitué» a été perdue lors du péché d’Adam, et qu’elle nous a été «restituée d’une façon plus admirable » encore par la Passion de Jésus-Christ, dont les effets nous sont communiqués par les sacrements, et par la grâce dont ils sont le signe et la cause, comment ignorer cette «qualité divine inhérente à l ‘âme», sans laquelle tout homme demeure privé de toute vraie dignité ? Comment se fier à l’homme pour sauver l’homme, alors que seule la grâce peut refaire de nous des hommes ?


Nous commençons avec ce numéro une série de conférences sur la grâce, qui se poursuivra dans le prochain numéro. Puissent ces conférences nous aider à mieux croire en la grâce, source unique de cette dignité qui permet à Dieu de mettre en l’homme sa complaisance.

Abbé Michel Simoulin