Carnet spirituel n° 52 : Les sacrements et la matière

Éditorial

Il sera beaucoup question de la « matière » dans ce carnet, et le Père nous entraînera sur des sentiers métaphysiques parfois difficiles ! Certains trouveront cela un peu ardu, mais s’ils persévèrent, les derniers pas du chemin seront lumineux !
Nous connaissons les sacrements, leur liste et leur définition, ou, du moins, nous croyons les connaître. Mais, en fait, si nous n’avons pas approfondi un peu les notions de matière et de forme, les relations entre elles, la finalité de leur union, etc… nous n’avons pas encore compris ce que sont les sacrements dans l’esprit de notre Sauveur.


C’est pourquoi, ces études sur la matière, qui est l’élément naturel de base du sacrement, sur lequel vient « tomber » une forme surnaturelle, sont capitales pour tout situer à sa place juste : la matière au service de l’esprit, la matière créée dans son être naturel pour devenir instrument de vie surnaturelle, la matière bonne mais devenue le terrain de nos tentations et de nos péchés par le péché d’Adam, la matière à la disposition du Rédempteur, la matière restaurée et même sanctifiée par Jésus-Christ pour devenir le moyen de notre salut.
Ce n’est pas que la matière soit devenue mauvaise, mais c’est le cœur de l’homme qui a été changé en pire : Adam n’a plus la science du monde matériel et de l’ordre des choses ; il a perdu la maîtrise de la terre et ne sait plus la gouverner, ni la travailler selon son ordination à l’esprit ; il la travaille pour lui-même, sans référence aux choses de l’âme ; et la terre produit alors des ronces et des épines, selon l’annonce faite par Dieu. (Genèse III, 17-19)


Et pourtant, toute matière, de la plus brute à la plus ténue, demeure à la disposition de Dieu pour agir sur les âmes, dissoudre le péché le plus enraciné et soulever les âmes les plus fragiles vers les sommets de la grâce. Une parole, un geste, un soupir de Jésus… une parole, un geste, un souffle du prêtre pour atteindre ce que cache le corps et donner ou rendre la vie à une âme ! Un peu d’eau, du vin, de l’huile, du pain, et Jésus est présent, la Croix est présente, le salut est offert aux âmes bien disposées, même engluées dans des années de misère et de péché.


Admirable sagesse de Dieu qui ne méprise rien de ce qui sert à l’homme, et sait user de toute sa création matérielle pour s’unir à ce qui le fait homme : son âme créée à son image.


Merci, mon Dieu, d’avoir compris que nous sommes esprit comme vous mais aussi matière, et de ne pas mépriser ce qui nous rend si dissemblable à vous et nous attire tant, mais d’en user pour nous en délivrer et nous conduire à vous.

Abbé Michel Simoulin